Partout en France cette année, la carte scolaire fait des ravages. Il n’y a que quelques rares académies qui seront bénéficiaires en postes budgétaires pour la rentrée 2023 comme l’académie de Nice qui se doit de gérer notamment des centaines d’élèves Ukrainiens arrivés depuis 2022 (voir tableau ci-dessous).

Source : https://www.professeurs-des-ecoles.com/2022/12/14/801-postes-supprimes-dans-le-primaire-pour-la-rentree-2023/

Partout donc, on ferme, les quotidiens régionaux relatent ainsi chaque jour des fermetures de classes. La ville de Paris non plus n’y échappera pas.

Source : https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/02/19/a-paris-des-fermetures-de-classes-sans-precedent-provoquent-la-colere-des-parents-et-des-enseignants_6162429_3224.html

On peut penser que le Ministère de l’Éducation Nationale rattrape le tacite moratoire des fermetures lors des années COVID et de l’année présidentielle où des classes ont été maintenues au titre de la pandémie puis de la campagne électorale.

Chaque année, les 43 904 directrices et directeurs renseignent ONDE en donnant des prévisions pour l’année suivante très tôt dans l’année scolaire. Le Ministère utilise nos prévisions et les couple avec les données INSEE pour préparer la carte scolaire suivante. Il est donc facile à tout directeur de savoir à court terme si notre école sera impactée ou pas par la carte scolaire.

Des fermetures où les enseignants et directeurs concernés resteront en retrait par devoir de loyauté envers l’administration ; ce sont donc les élus, les parents, les associations de parents, les syndicats qui vont tenter de modifier la carte scolaire. Ce sont eux qui vont donc interpeller les journalistes pour mobiliser.

Des pétitions seront également mises en ligne pour dire NON à des fermetures :

Source : https://www.mesopinions.com/petition/enfants/fermeture-classe/171488

Notre syndicat, suite à la demande de plusieurs collègues, a interpellé des députés afin qu’ils relaient les inquiétudes locales en posant des questions orales ou écrites au ministre Pap NDIAYE.

Les élus locaux se référent souvent à l’Agenda Rural pour demander la suspension des fermetures en milieu rural. L’Agenda Rural 2 est en cours de finalisation.

Pour mémoire, l’Agenda Rural 1 indiquait clairement en 2019 que “l’école est le premier service public dans les territoires. La vie locale s’organise autour de cette institution : la mairie, les commerces de proximité, le stade ou le gymnase, etc. Lorsqu’une classe ou une école ferme, c’est la survie des petits villages qui est menacée.”

Il y était également indiqué que l’école était également apparue au cours du grand débat voulu par Emmanuel MACRON comme une préoccupation majeure des habitants des territoires ruraux.

Les suppressions de postes et les fermetures de classes successives ont renforcé la défiance des parents et des élus locaux vis-à-vis d’un ministère qui apparaît comme centralisé et éloigné des réalités locales.

Les études montrent que la réussite scolaire n’est pas un problème en milieu rural ; au contraire, les élèves ruraux réussissent mieux que les urbains. Le taux d’encadrement y est également plus élevé que la moyenne nationale, mais cela masque d’autres réalités auxquelles sont confrontés les établissements scolaires ruraux : l’éloignement des élèves, la faiblesse des réseaux de transports scolaires, le manque de personnel administratif, les difficultés de recrutements, etc.

Enfin, la véritable problématique scolaire en milieu rural est l’orientation et les freins qui pèsent sur les élèves et les familles pour la poursuite des études au lycée et en études supérieures.

Le projet de loi pour l’école de la confiance n’avait répondu que partiellement aux attentes des territoires ruraux. La Mission de l’Agenda Rural 1 se félicitait d’ailleurs du retrait de la création d’établissements des savoirs fondamentaux dans le projet de loi, qui constituait selon elle une menace pour le maillage territorial scolaire et faisait courir le risque d’une concentration de plus en plus forte des élèves dans les territoires ruraux.

Ces éléments de constat appelaient des mesures fortes et exigeantes. L’Agenda Rural I demandait ainsi tout d’abord de garantir l’accès à une école maternelle et primaire à moins de 20 minutes et de ne pas affecter d’enseignants sur plus de deux établissements. Les fermetures de classes et certains regroupements pédagogiques (RPI) ont engendré un allongement des temps de trajet pour les enfants qui ne sont plus acceptables. D’autre part, l’affectation d’enseignants sur plus de deux établissements a pour conséquence d’affaiblir la dynamique pédagogique dans les établissements, ce qui est très regrettable tant pour les enseignants que pour les élèves.

La Mission recommande de travailler à une plus forte territorialisation des politiques éducatives de l’État, afin de mieux prendre en compte les spécificités des territoires ruraux. Pour cela, la Mission recommande d’établir un indice d’éloignement et de fragilité socio-économique des élèves qui classerait les établissements, notamment les collèges, selon leur pertinence territoriale et leur zone de recrutement. Ce critère doit permettre de définir les établissements qu’il ne faut absolument pas fermer car ils assurent une fonction de centralité dans les territoires ruraux. Il doit servir également à assurer une péréquation nationale de la répartition d’effectifs d’enseignants, afin d’affecter plus d’enseignants dans les académies où le nombre d’établissements « éloignés » est élevé.

Des députés de tous les partis s’inquiètent donc des fermetures de classes dans leur circonscription depuis l’annonce de la carte scolaire.

Voici ci-dessous 2 exemples de questions visibles depuis 21 février 2023 sur le site du Journal Officiel :

Question de Mme Caroline FIAT, députée LFI de Meurthe-et-Moselle qui demande un moratoire sur les fermetures en milieu rural :

Source : https://questions.assemblee-nationale.fr/q16/16-5739QE.htm

Question de Mme Delphine LINGEMANN du MoDem du Puy-de-Dôme qui interpelle sur les fermetures dans son département malgré des projets d’urbanisme :

Source : https://questions.assemblee-nationale.fr/q16/16-5734QE.htm

De nombreux élus demandent au gouvernement que les zones rurales ne soient plus traitées comme les zones urbaines car les problématiques sont différentes en raison notamment de l’éloignement.

Notre syndicat est conscient de la baisse démographique prévue par l’INSEE (60 000 élèves de moins en prévision dans les établissements scolaires en 2023 par rapport à 2022) mais regrette le choix de fermer mécaniquement sans réfléchir à l’objectif de réduire le nombre d’élèves dans chaque classe notamment dans les écoles orphelines des dispositifs REP car, la France a, parmi les pays européens, un des nombres d’élèves le plus important par enseignant :

Source : https://www.insee.fr/fr/statistiques/2389162#graphique-figure1

Les Commissions locales pour déterminer officiellement la carte scolaire, les fermetures et les ouvertures se déroulent en ce moment ; nous sommes attentifs à toute situation que vous voudrez bien nous faire remonter.

Thierry PAJOT, SG, Gonfaron, 21 février 2023.