Cette semaine, le budget de la mission Enseignement scolaire était étudié au Sénat ; le temps imparti pour la centaine d’amendements était de 4 heures ; ce ne fut malheureusement pas suffisant pour étudier l’amendement 90 qui portait sur la décharge d’enseignement dès 10 classes…. Suite à la censure du gouvernement de Michel BARNIER, la suite de la discussion est ajournée.

Nous vous décrivons ici les amendements adoptés par les sénateurs lors de cette séance (avant la censure) et vous allez le constater, le mot « rabot » fut de mise car ils ont supprimé au final des millions d’euros à ce budget sur l’autel du déficit à combler…

Avant, nous vous donnons des nouvelles de nos indemnités de direction par l’intermédiaire de 2 députés qui ont interrogé cette semaine la ministre sur leur faiblesse…

Voici leur question : M. Christophe MARION (député du Loir-et-Cher) et « M. Didier LE GAC (député du Finistère) attirent l’attention de Mme la ministre de l’éducation nationale sur la mise en œuvre de la loi n° 2951 créant un statut spécifique de directeur d’école.

Dans l’exposé des motifs de ce texte, il était rappelé que les directeurs d’école sont des enseignants qui assurent des responsabilités de direction en plus de leur charge d’enseignement dans 85 % des écoles, sans réel pouvoir de décision » et que « aujourd’hui, la direction d’une école est une grande responsabilité, un engagement à temps plein, quel que soit le temps réservé à cette mission. Cette fonction s’apparente pourtant à un second emploi, ne générant pas d’avancement de grade, n’accélérant que peu le déroulement de la carrière. La seule reconnaissance est une bonification indiciaire, allant de 200 à un peu plus de 400 euros en fonction de la taille de l’école ».

C’est d’ailleurs pourquoi, cette proposition de loi instaurait en son article 2 pour ces directeurs d’école « une indemnité de direction spécifique fixée par décret ». Pourtant, au moment où les décrets d’application de cette loi devaient être signés, cette partie relative à la création de cette indemnité a été jugée sans objet, dans la mesure où considérée comme déjà satisfaite par le décret n° 83-644 du 8 juillet 1983 portant attribution d’une indemnité de sujétions spéciales aux directeurs d’école maternelle et élémentaire, aux maîtres directeurs et aux directeurs d’établissement spécialisé.

Selon la rédaction de ce décret de 1983, les taux annuels de cette indemnité, mise en place il y a plus de quarante ans, sont fixés par arrêté conjoint du secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de la fonction publique et des réformes administratives, du ministre de l’économie, des finances et du budget et du ministre de l’éducation nationale.

Autrement dit, la loi adoptée en 2021 reste en matière de revalorisation financière des fonctions de directeur d’école primaire assujettie à un décret de 1983 qui fixe par arrêté les taux annuels de cette revalorisation. C’est pourquoi afin que, a minima, l’esprit de la loi de 2021 soit respecté, ils lui demandent quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour que les directeurs d’école primaire puissent bénéficier désormais d’indemnités de sujétions nettement supérieures à celles qui ont prévalu de 1983 à aujourd’hui.

A suivre mais quel ministre répondra à cette question ?… En tout cas notre lobbying syndical de proximité de nos référents départementaux porte ses fruits et nous discutons constamment avec les parlementaires, députés ou sénateurs pour améliorer notre quotidien.

Sinon les décisions des sénateurs ?

Les sénateurs ont adopté à une forte majorité lundi matin un amendement qui réduit d’un milliard (sur les 2,1 prévus) le budget alloué à notre formation continue… en avançant l’argument implacable que le ministère ne dépense jamais le budget prévu…

Leurs arguments : « La sous consommation des crédits dédiés à la formation, initiale comme continue, des enseignants est un phénomène récurrent depuis 2015 (…). Si les crédits ouverts en loi de finances sont en augmentation sur la période pour atteindre plus de 2,1 milliards d’euros au PLF 2025, les crédits exécutés n’ont jamais été aussi faibles et autant sous-consommés depuis 10 ans.

En 2020, le montant total des crédits sous-consommés était de 414 millions d’euros.

En 2021, il était de 478 millions d’euros.

En 2022, il s’élevait à 658 millions d’euros, soit près de 40 % des crédits ouverts qui n’auront pas été utilisés.

En 2023, il était même de 1,1 milliard d’euros. Que l’écart de consommation ne se réduise pas mais tende au contraire à augmenter dans de telles proportions pose de réelles questions quant à la sincérité budgétaire des montants ouverts en loi de finances.

Le montant des crédits ouverts en loi de finances augmente entre 2024 et 2025 de presque 33 millions d’euros.

En conséquence, afin d’améliorer la sincérité de la prévision budgétaire pour 2025, le présent amendement minore de 1 milliard d’euros le montant des crédits ouverts au titre de la formation des enseignants, sans diminuer les crédits qui seront réellement utilisés. En effet, cet amendement ramène à 1,1 milliard d’euros les montants accordés au titre de la formation des enseignants, ce qui constitue tout de même un montant pratiquement équivalent à celui consommé en 2023.

Il minore donc de 515 millions d’euros les crédits de « formation des personnels enseignants du premier degré », de 450 millions d’euros les crédits de « formation des personnels enseignants et d’orientation du second degré » et enfin de 35 millions d’euros les crédits de formation des personnels enseignants de l’Enseignement privé du premier et du second degrés ».

Source : https://www.senat.fr/amendements/2024-2025/143/Amdt_II-18.html

Les sénateurs ont ensuite adopté un amendement qui réduit de 20 millions le budget de Canopé (en reversant 12 millions aux MFR) selon les prétextes suivants : « Le réseau Canopé, dont l’objectif est la formation continue des enseignants et de la communauté éducative, a un rôle difficile à distinguer de celui des Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (INSPé) et des Écoles académiques de la formation continue (EAFC). La multiplication des instances dédiées à la formation des personnels de l’Education nationale a vraisemblablement pour effet une perte d’efficience et ne justifie donc pas le maintien d’une subvention élevée. 

Un récent rapport de la Cour des comptes recommande d’ailleurs l’approfondissement de la recherche de ressources propres pour cet opérateur, qui dispose d’une offre de services (prestations de conseils, indexation de ressources et organisation d’évènements pédagogiques, vente de solutions documentaires aux établissements). Le réseau Canopé a ainsi une stratégie de développement à l’international via notamment une offre de formations aux enseignants francophones. Ces stratégies doivent être davantage poussées par l’opérateur.

Le Réseau Canopé se voit allouer une subvention de 85 millions d’euros au PLF 2025, alors qu’il disposait d’un fonds de roulement de 25 millions d’euros à fin 2023. Une baisse de 20 millions d’euros de la subvention parait donc justifiée.

Cet amendement vise également à abonder les crédits alloués à la Fédération des maisons familiales rurales de 12 millions d’euros. »

Source : https://www.senat.fr/amendements/2024-2025/143/Amdt_II-19.html

Après Canopé, un autre « opérateur » l’ONISEP s’est vu amender de 5 millions d’euros sous les prétextes suivants : « La structure dispose d’un budget de 22,7 millions d’euros en PLF 2025, soit un montant stable par rapport à 2024. Le maintien de la subvention est surprenant, alors que les missions de l’ONISEP ne sont pas aisément distinguables de celles des régions.

En effet, suite à la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 sur la liberté de choisir son avenir professionnel, la compétence d’information sur l’orientation a été transmise aux régions. Le rôle de l’ONISEP s’en est trouvé réduit de même que ses effectifs.

Toutefois, un récent rapport de la Cour des comptes pointe l’absence d’efficience de l’organisation actuelle de l’ONISEP et recommande notamment la suppression de 17 emplois de directeurs territoriaux, dont l’existence ne se justifie pas depuis le transfert de la compétence aux régions. Or une suppression de 17 ETP impliquerait a minima une économie de 2 millions d’euros.

Sachant qu’à la fin 2023, l’ONISEP disposait d’un fonds de roulement de 6 millions d’euros, une économie de 5 millions d’euros parait tout à fait justifiée concernant cet opérateur. » 

Source : https://www.senat.fr/amendements/2024-2025/143/Amdt_II-20.html

Plusieurs sénateurs dont le métier premier est l’enseignement ont pris part à la discussion autour de l’amendement sur le CEE et son inutilité… Faut-il en croire à l’inutilité des évaluations des écoles et des établissements du second degré ?

Au final, l’amendement de suppression du CEE fut voté… avec les arguments suivants : « Cet amendement d’appel vise à supprimer le Conseil d’évaluation de l’école. Cet organe coûteux  et inutile dont les évaluateurs sont principalement internes au système éducatif  (IEN 30% ; directeurs 30% et conseillers pédagogiques 25%) ne saurait garantir l’indépendance de l’évaluation et constitue d’abord un moyen de contrôler la liberté pédagogique.

Le bleu n’est guère transparent et nulle part les moyens du CEE ne sont fléchés précisément. En l’absence de transparence, les auteurs de l’amendement sont dans l’obligation de chiffrer à 4 millions d’euros le coût global de ce conseil.

Notre amendement vise donc à supprimer 4 000 000 € à l’action “évaluation et contrôle” du « soutien de la politique de l’éducation nationale » afin de mettre un terme au Conseil d’évaluation de l’école, organe inadapté et coûteux.

Source : https://www.senat.fr/amendements/2024-2025/143/Amdt_II-450.html

Les sénateurs craignent un grand nombre de fermetures de classes et d’école dans les zones rurales et ils ont donc déposé un amendement qui supprimait la fermeture de 4 000 postes d’enseignants en la limitant à 2 000 avec les arguments suivants en octroyant au final une hausse de 74 millions du budget pour les maintenir : « L’objectif de cet amendement est de revenir sur la baisse annoncée lors du projet de loi de finances pour 2025 de 4 000 emplois de professeurs, dont 3 815 enseignants du premier degré. Il vise donc à limiter la baisse du nombre de professeurs des écoles à 2 000 emplois, et non à 4 000 comme annoncé.

L’amendement majore ainsi les crédits de Enseignement scolaire du premier degré de 74 millions d’euros. Il minore les crédits de l’« Enseignement général et technologique en lycée » du programme « Enseignement scolaire du second degré », destiné au Pacte enseignant.

En effet, le ministère de l’Éducation nationale a consacré 700 millions d’euros au pacte enseignant en 2024 et il a l’intention d’y consacrer près de 800 millions d’euros en 2025. En période de contrainte budgétaire, sans nier l’intérêt que peut représenter une telle rémunération, cette hausse ne semble pas justifiée, d’autant qu’il n’est pas certain que le nombre d’enseignants y adhérant augmente. Seul un tiers des enseignants avaient adhéré à au moins une « brique » du Pacte en mai 2024.

En conséquence, cet amendement propose de revenir pour moitié sur la suppression annoncée de 4 000 emplois de professeurs du premier degré, afin de tenir compte des enjeux de baisse d’effectifs d’élèves de manière progressive, sans nuire aux territoires les plus ruraux.

L’augmentation de 74 millions d’euros devrait permettre, sans grever le budget, de ne supprimer que 2 000 postes. »

Article Public Sénat

« La diminution des effectifs doit être progressive et précautionneusement ciblée »

Avec près de 100 000 élèves en moins attendus à la rentrée 2025, le ministère de l’Education nationale avait justifié ces suppressions de postes par des raisons démographiques. Un argument qui passe mal, pour tous les groupes du Sénat, qui ont épinglé les calculs du gouvernement. « S’il ne faut pas ignorer la démographie, la politique ne saurait se résumer à un exercice purement comptable ? L’art du politique, c’est de rendre souhaitable ce qui est possible. Est-il souhaitable que la France soit l’un des Etats de l’OCDE avec l’un des pires taux d’encadrement ? Non », a estimé Olivier Paccaud.

En divisant par deux les objectifs de suppression de postes du gouvernement, la majorité sénatoriale entend par ailleurs préserver les écoles rurales d’une baisse des effectifs qui risquerait d’entraîner des fermetures d’établissements. « La diminution des effectifs doit être progressive et précautionneusement ciblée. Elle présente un risque essentiellement pour les écoles rurales, qui ont déjà perdu 8,5 % de leurs effectifs entre 2015 et 2023 et sont donc les plus susceptibles d’être visées », a expliqué Olivier Paccaud.

La ministre de l’Education nationale s’est montrée sensible aux arguments du rapporteur spécial, en n’émettant pas d’avis défavorable à la proposition du Sénat, elle a tout de même fait savoir qu’elle était « plutôt réservée ». Anne Genetet a par ailleurs défendu que les suppressions de postes envisagées par son ministère n’auraient aucune incidence négative sur le taux d’encadrement des élèves. «Regardons la réalité de ce projet de loi de finances. Les écoles publiques comptent en moyenne 21 élèves par classe, c’est le niveau le plus bas depuis que nous mesurons cet indicateur. Dans les collèges et les lycées publics, le nombre d’heures hebdomadaires d’enseignement par élèves continuera de progresser », a défendu la ministre.
Source : https://www.publicsenat.fr/actualites/education/budget-2025-le-senat-propose-la-suppression-de-2-000-postes-denseignants-contre-les-4-000-prevus-par-le-gouvernement

Source amendement : https://www.senat.fr/amendements/2024-2025/143/Amdt_II-21.html

Dernier amendement adopté ce lundi 2 décembre, un budget pour sanctuariser en attendant le nouveau décret ministériel prévu avant Noël sur l’emploi des AESH sur le temps de midi (le décret actuel étant flou et difficilement applicable selon les collectivités).

Les arguments des sénateurs : « Le présent amendement a pour objectif de mettre les crédits nécessaires pour appliquer la loi du 27 mai 2024 visant la prise en charge par l’Etat de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne.

Cette loi a pour objectif de revenir à l’esprit initial de la loi de 2005, à savoir, une prise en charge financière par l’Etat des AESH durant le temps méridien afin de favoriser l’inclusion scolaire de ces élèves.

Toutefois, la mise en œuvre de cette loi, dans les territoires, pour cette rentrée 2024 a été particulièrement compliquée pour deux raisons :
–   Une circulaire publiée en juillet 2024 a introduit une telle complexité qu’elle entrave désormais l’application de la loi,
–    Le budget nécessaire pour permettre le financement des AESH sur le temps méridien n’a pas été dégagé sur l’année scolaire 2024-2025 il convient de le prévoir au budget 2025 afin que la loi puisse s’appliquer pleinement.

Par cet amendement, il est proposé de transférer 31 millions d’euros en crédits de paiement et en autorisations d’engagement depuis l’action « Logistique, système d’information, immobilier » du programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale » vers l’action « Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap » du programme « Vie de l’élève ».

Source : https://www.senat.fr/amendements/2024-2025/143/Amdt_II-575.html

Faute de temps, les 4 heures prévues étant écoulées, d’autres amendements notamment celui-ci dessous sur la décharge à 10 classes ne furent pas étudiées… A suivre…

Amendement sur les décharges des directrices et directeurs d’école numéro 128.

Objet

« Les directrices et directeurs d’école ont de nombreuses responsabilités mais bénéficient parfois de trop peu de temps de moyens pour remplir l’ensemble des missions qui leur sont confiées. Les directeurs sont donc tiraillés entre les tâches quotidiennes et le pilotage pédagogique, les premières prenant le pas sur le second, au détriment du suivi des élèves, de l’enseignement et du pilotage pédagogique du projet d’école. Les inspecteurs d’académie finissent par avoir du mal à recruter des directeurs, tant la tâche est considérée comme ingrate, difficile et mal reconnue.

Grâce à la proposition de loi créant la fonction de directeur d’école votée le 26 juin par l’Assemblée nationale, les décharges ont été amplifiées avec une refonte du calcul prenant en compte les spécificités des écoles et non plus en prenant le seul critère du nombre de classes. Toutefois, un certain nombre de directrices et directeurs d’école ne bénéficient toujours pas de décharge à temps plein, malgré une charge de travail très importante.

Aussi, cet amendement propose de financer la décharge à temps plein des directrices et directeurs ayant des écoles de 10 classes et plus. Il finance également l’ouverture d’heures supplémentaires de décharges pour les écoles qui accueillent des enfants à besoin particulier ou en situation de handicap et pour les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI).

Pour ce faire, cet amendement : budget de 42 millions pris sur l’action « Logistique, système d’information, immobilier ».

Source : https://www.senat.fr/amendements/2024-2025/143/Amdt_II-128.html

A noter que le CNED a « sauvé » son budget… Lui…

Mise en forme de TP, Gonfaron, 4 décembre 2024

Source des scrutins : https://www.senat.fr/scrutin-public/dossiers/pjlf2025_scr.html#lec1

La vidéo des 4 heures de débat au Sénat est à retrouver ici :

https://videos.senat.fr/video.4885976_674d6481b3b2b.seance-publique-du-2-decembre-2024-matin