Suite à une commission d’enquête du Sénat sur le signalement et le traitement des pressions, menaces et agressions dont les enseignants sont victimes, les sénateurs ont formulé et rendu publique  38 recommandations pour protéger l’école ainsi que l’ensemble du personnel qui y travaille et restaurer l’autorité de l’institution scolaire.

Défendre et promouvoir la laïcité au sein de l’institution scolaire

• Recommandation n° 1 : dans les établissements scolaires publics et privés sous contrat, instaurer tous les ans en octobre dans chaque établissement scolaire un hommage aux enseignants assassinés, dont les modalités tiendraient compte de l’âge des élèves.

• Recommandation n° 2 : modifier la rédaction de l’article L. 312-15 du code de l’éducation, afin de recentrer le contenu de l’enseignement moral et civique sur la connaissance des institutions françaises et européennes, la compréhension des enjeux internationaux, sociétaux et environnementaux du monde contemporain, ainsi que sur les valeurs de la République et la laïcité.

• Recommandation n° 3 : élaborer dans chaque établissement un projet d’établissement incluant des actions relatives aux valeurs de la République et à la laïcité, afin de fédérer l’équipe pédagogique et administrative autour de leur défense et promotion ; renforcer le dialogue entre les enseignants.

• Recommandation n° 4 : à court terme et pour garantir la formation des futurs enseignants à la promotion des valeurs de la République et de la laïcité dans le cadre spécifique scolaire, faire de celle-ci un module majeur de leurs formations en INSPÉ et prévoir qu’elle soit réalisée par un fonctionnaire de l’éducation nationale.

• Recommandation n° 5 : rendre obligatoire pour tout contractuel et au plus tard dans le mois suivant sa prise de poste une formation à la défense de la laïcité et des valeurs de la République, s’appuyant sur des cas concrets – et prévoir la remise systématique des guides du conseil des sages de la laïcité.

• Recommandation n° 6 : élargir pour les élèves l’interdiction du port de signes et tenues religieux ostentatoires à toute activité organisée par l’institution scolaire, y compris en dehors du temps scolaire (sortie scolaire le soir, cérémonie de remise d’un prix pour un concours organisé par l’éducation nationale ou en partenariat avec le ministère, participation à un forum d’orientation organisé par l’établissement scolaire , …).

Améliorer la formation du personnel éducatif afin de mieux lui permettre de faire face aux contestations d’enseignement et à la gestion des conflits

• Recommandation n° 7 : rendre la main à l’éducation nationale pour la formation des enseignants en ne faisant plus dépendre la formation initiale de l’université.

• Recommandation n° 8 : mieux préparer les agents de l’éducation nationale et des collectivités territoriales (y compris le personnel d’accueil) aux situations de tension et de conflit en favorisant la mise en place d’une culture partagée de la sécurité : à cette fin, développer notamment les formations communes sur les attitudes à adopter face aux élèves, aux parents et aux tiers dans les classes et au sein des établissements.

Réaffirmer l’autorité de l’institution scolaire

• Recommandation n° 9 : dans les établissements scolaires publics et privés sous contrat, rappeler systématiquement aux parents en début d’année les prérogatives de l’enseignant (en matière de notation, liberté pédagogique, choix des textes), le caractère obligatoire des programmes scolaires en insistant sur les chapitres ou enseignements (natation en EPS) susceptibles d’être source de contestations, ainsi que les sanctions pénales en cas d’entrave à l’enseignement. Pour cela, faire signer aux parents une « charte des parents » et y inclure spécifiquement le délit d’entrave à l’enseignement, assorti d’exemples concrets ; l’annexer au règlement intérieur.

• Recommandation n° 10 : afin de mettre fin au non-respect répété des règles du vivre ensemble au sein d’établissements scolaires par un élève perturbateur : prévoir la signature d’un protocole d’accompagnement et de responsabilisation des parents (PAR) dès la première exclusion, entre les parents et l’autorité académique, en présence du chef d’établissement. Ce protocole précise les engagements des parents de l’élève pour permettre l’amélioration du comportement de leur enfant ainsi que les mesures d’accompagnement mises en œuvre au sein de l’établissement ; créer une sanction pénale, sur le modèle de la sanction pour non-respect de l’obligation d’assiduité scolaire, pour non-respect répété des règles de fonctionnement et de la vie collective des établissements.

• Recommandation n° 11 : sécuriser juridiquement les procédures disciplinaires afin de limiter les risques contentieux ; informer les personnels sur la portée réelle du risque de judiciarisation par les parents.

• Recommandation n° 12 : afin de protéger les enseignants et les élèves et permettre une scolarité dans un climat scolaire apaisé, simplifier les procédures des conseils de discipline.

• Recommandation n° 13 : encourager les conseils de discipline à décider des mesures de responsabilisation ; pour favoriser leur mise en œuvre, développer dans chaque département une convention entre le DSDEN, le conseil départemental et les partenaires locaux afin de créer un réseau de prise en charge des élèves soumis à une mesure de responsabilisation.

• Recommandation n° 14 : développer les structures d’accueil pour les élèves hautement perturbateurs ou poly-exclus.

• Recommandation n° 15 : garantir l’effectivité des dispositions votées dans le cadre de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République ; pour améliorer le suivi des risques posés par les réseaux sociaux, augmenter les moyens dévolus au suivi des réseaux sociaux et d’internet.

Mettre fin au « pas de vague »

• Recommandation n° 16 : afin de conforter les chefs d’établissement dans les signalements d’incidents, rappeler le principe selon lequel ils ne sont pas évalués en fonction du nombre de signalements effectués.

• Recommandation n° 17 : afin de mettre fin au « pas de vague », partager à l’échelle nationale les registres des sanctions des établissements scolaires, pour que toute incivilité, atteinte ou autre fait grave commis à l’encontre d’un personnel de l’éducation nationale fasse l’objet d’une réponse cohérente de la part de l’institution.

• Recommandation n° 18 : rappeler la possibilité ouverte à tout enseignant de signaler directement un « fait établissement » au ministère, sans passer par le chef d’établissement.

Assurer la sécurité des établissements scolaires et de leurs abords

• Recommandation n° 19 : généraliser les moyens d’alerte directe entre un établissement scolaire et les commissariats ou gendarmeries (bouton d’alerte, ligne directe, …).

• Recommandation n° 20 : dans les quartiers marqués par un niveau élevé de violence des mineurs, nouer des partenariats renforcés entre les établissements scolaires, la police et les procureurs.

• Recommandation n° 21 : afin de faire de la police municipale le premier interlocuteur des chefs d’établissement, généraliser les coopérations entre les communes et les collèges et lycées pour permettre le déploiement de la police municipale aux abords des établissements.

• Recommandation n° 22 : étendre aux enseignants et au personnel administratif la formation dispensée par la gendarmerie aux cadres de l’éducation nationale à la « prévention et à la gestion de crise ».

• Recommandation n° 23 : permettre la mise en place de caméras de vidéoprotection filmant l’extérieur de l’établissement scolaire sans l’accord de son conseil d’administration.

• Recommandation n° 24 : garantir l’effectivité de la réalisation du diagnostic de sécurité des établissements scolaires, en lien avec le référent « sécurité » ainsi que les collectivités territoriales, propriétaires du bâti scolaire, et s’assurer de son actualisation régulière.

Rendre les dispositifs administratif et policier de prévention plus efficaces

• Recommandation n° 25 : renforcer l’information du personnel de l’éducation nationale sur la possibilité d’être inscrit dans la base de données de sécurité publique.

• Recommandation n° 26 : afin d’améliorer le recours à la protection fonctionnelle du personnel, rendre automatique l’octroi de la protection fonctionnelle pour les agents de la communauté éducative victimes de violences et outrages du fait des élèves, des parents d’élèves ou de tiers ; l’administration aurait la faculté de la retirer dans un second temps.

Fluidifier le parcours judiciaire pour les agents victimes

Rendre les procédures policières et judiciaires plus simples, rapides et transparentes pour le personnel éducatif

• Recommandation n° 27 : pérenniser ou généraliser les référents identifiés dans chaque brigade de gendarmerie ou de commissariat pour renseigner les agents de l’éducation nationale sur le dépôt de plainte.

• Recommandation n° 28 : afin de faciliter la prise de plainte, permettre à l’administration de déposer plainte elle-même (en lieu et place de l’agent) en cas d’agression d’un agent.

• Recommandation n° 29 : rappeler la possibilité ouverte à tout fonctionnaire de saisir lui-même le procureur de la République d’un signalement sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale.

Renforcer les liens entre autorité judiciaire et éducation nationale

• Recommandation n° 30 : généraliser les conventions signées entre les parquets et les DASEN ou établissements de leur ressort, afin de présenter le rôle de l’autorité judiciaire, préciser le cadre du signalement et élaborer une trame de signalement commune à l’ensemble des DASEN qui soit directement exploitable par l’autorité judiciaire.

• Recommandation n° 31 : systématiser la rencontre annuelle entre les parquets et les chefs des établissements scolaires de leurs ressorts.

• Recommandation n° 32 : renforcer les liens entre les parquets et les services des renseignements territoriaux, afin que ceux-ci aient accès aux éléments de la procédure judiciaire.

Pour une justice plus rapide et transparente pour le personnel éducatif

• Recommandation n° 33 : prévoir que l’audience pour juger l’auteur de violences, menaces ou outrages à l’encontre d’un membre de la communauté éducative ait systématiquement lieu dans le courant de l’année scolaire au cours de laquelle les faits ont eu lieu.

• Recommandation n° 34 : automatiser l’information des membres du personnel éducatif sur les suites données à leur plainte.

• Recommandation n° 35 : automatiser l’information des membres du personnel éducatif sur les suites données aux plaintes déposées contre eux.

Renforcer la coopération entre l’éducation nationale, les forces de l’ordre et les services de renseignement

• Recommandation n° 36 : généraliser le travail partenarial engagé, dans l’Académie de Versailles, entre le rectorat et les services départementaux du renseignement, à l’ensemble des académies, pour l’ensemble des établissements publics et privés sous contrat.

• Recommandation n° 37 : systématiser les séances de sensibilisation dispensées par les services territoriaux du renseignement territorial auprès de l’ensemble du personnel éducatif, afin notamment d’améliorer la qualité des signalements effectués par les chefs d’établissements aux services du renseignement territorial.

• Recommandation n° 38 : prévoir l’information obligatoire de l’autorité académique et du chef d’établissement de la mise en examen ou de la condamnation pour une infraction terroriste (dont l’apologie) d’une personne scolarisée ou ayant vocation à être scolarisée dans un établissement scolaire, public ou privé.


Source : https://www.senat.fr/travaux-parlementaires/structures-temporaires/missions-dinformation-communes/mission-conjointe-de-controle-sur-le-signalement-et-le-traitement-des-pressions-menaces-et-agressions-dont-les-enseignants-sont-victimes.html